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Non merci !

Les guerriers Gascons, Atelier d’art Terre de Grès à Eymet, France

En Gascogne, il fut un temps où le panache comptait plus que tout. Il y a cette tirade, magnifique, éternelle, ce souffle de Cyrano qui inspire les mots qui suivent :

Non merci,

Non merci ces chemins balisés qui détournent du sens.

Se complaire en médiocre, oublier l’idéal, non merci.

Non merci, ces chapelles partisanes que les masses encensent.

Préférer les eaux plates, ignorer les épreuves, non merci.

Non merci, les honneurs, les flatteurs, ces sirènes d’absence.

Écraser les petits, se courber face aux grands, non merci.

Non merci, les lumières et la science, s’ils meurent à la conscience.

Vouloir être servi, plutôt qu’être au service, non merci.

Par contre,

Se pendre la tête en bas, comme les chauves-souris,

Et voir dans les étoiles des parcours de géants;

Savoir pister l’anguille sur les traces d’antan,

Pour y lire les annales, ce baume qui guérit;

Remonter à la source, imiter le saumon,

Pour danser sur les monts et purifier les cœurs;

Défier les hardes noires, sans vaincu ni vainqueur,

Et côtoyer les risques, apaiser les démons;

Observer les colverts quand ils prennent le large,

Pour oser l’aventure, des horizons sans âge;

Tutoyer les tortues en quête de présages,

Et chanter des messages, où les âmes s’engagent ;

Vouloir tenir son rang dans la meute sauvage,

Et pouvoir la quitter, à l’appel des rois mages.

oui, trois fois oui, toujours et encore.

(Inspiré de la fameuse tirade des nez dans Cyrano de Bergerac, pièce de théâtre écrite presque entièrement en alexandrins par Edmond Rostand à la fin du XIX° siècle). 

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Sakura

Les feuilles tombent,
et l’eau passe, éternelle…

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Le « Land Art » dans Rivers & Tides

land art branches
Instantané extrait du film Rivers and Tides

L’artiste Andy Goldsworthy, par ses œuvres, rend non seulement hommage à un site et son environnement mais le fait parler et nous rend accessible l’âme du lieu à travers des images. Fragiles, éphémères et éternelles, ses œuvres, reflets de ce qui est invisible aux yeux, sont des ponts qui permettent de reprendre le dialogue avec la Terre et la nature en général. Leur processus de création est long (en effet, l’élaboration peut durer plusieurs mois) et incertain quant au résultat (car un souffle de vent peut faire s’écrouler l’œuvre en cours). Cela demande une totale implication et une observation profonde, beaucoup de cœur, de patience et de détachement, ainsi qu’une certaine recherche d’harmonie et de communion avec le monde naturel. Le Land Art fait partie de ces nouvelles voies en accord avec le besoin général de ralentir, d’écouter, de préserver, d’aimer, sans être dans une passivité oisive, ni en réactivité avec la société. En d’autres termes, la perception du temps change et met en perspective notre propre temporalité, car chaque œuvre est éphémère.

arbre dégradé sycomore goldsworthy
November 2013 – Andy Goldsworthy – source

Le Land Art, sans être un but ultime, inspire à créer des états de conscience où l’âme de la nature devient perceptible. 

Pour apprendre à naviguer dans un environnement rempli d’incertitudes, ce processus de création ne serait-il pas un des plus beaux cadeaux à faire à nos enfants et à nous-mêmes ? Le fait de voir son œuvre disparaître selon les lois de la nature ne pourrait-il pas aider à développer la notion de résilience1En physique, la résilience traduit l’aptitude d’un corps à résister aux chocs et à reprendre sa structure initiale. et la capacité à élargir nos propres frontières ? Quoiqu’il en soit, dépêchons-nous, car le béton, les routes et les champs d’agriculture industrielle décomposent toujours plus les paysages et cette dégradation réduit ainsi la possibilité de pratiquer le Land Art.

A l’instar de Vincent Munier, ce documentaire est un des rares témoignages dédiés au beau dans le monde d’aujourd’hui.

Références

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1 En physique, la résilience traduit l’aptitude d’un corps à résister aux chocs et à reprendre sa structure initiale.
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Mr GAGA, sur les pas d’Ohad Naharin

Danseur prodige et chorégraphe désormais emblématique de la danse contemporaine actuelle, Ohad Naharin est directeur de la Batsheva Dance Company. Reconnu et sollicité à travers le monde entier, il a été récompensé par de nombreux prix internationaux pour sa riche contribution au monde de la danse. Le documentaire Mr Gaga, réalisé par Tomer Heymann, nous fait plonger dans le parcours de ce personnage exceptionnel, en tant qu’artiste et en tant qu’homme.

Spectacle “Max” d’Ohad Naharin par la Batsheva Dance Compagny
Photo: Gadi Dagon

Lorsque l’on découvre les œuvres d’Ohad Naharin, interprétées par la Batsheva, on est époustouflé par leur beauté saisissante. Sans qu’on puisse vraiment dire pourquoi, elles dégagent une poésie puissante, une sensualité hypnotique qui fait preuve d’une profonde sensibilité humaine. Ce sont des expériences esthétiques bouleversantes qui délivrent aux yeux du monde, comme une preuve, la beauté de ce qui peut être réalisé lorsque les volontés individuelles s’alignent au service d’une création poétique universelle. C’est en ce sens que le travail d’Ohad Naharin et de la Batsheva peut être mis en lien avec la Voie du guerrier lettré, pacifique et poète développée à travers le res’0.

Le documentaire nous montre que l’existence de ces œuvres est le résultat d’un long et difficile travail qui se situe à différents interstices : entre l’homme et l’artiste, entre le chorégraphe et les danseurs, et que cette alchimie donne naissance à un message universel de fond qui parle au-delà de la danse.

L‘homme et l’artiste : suivre sa voie, trouver sa voix

Spectacle “Max”, créé par la Batsheva Dance Compagny en 2007 et interprété ici par la GöteborgsOperans Danskompani.

Le chorégraphe qu’est aujourd’hui Ohad Naharin est le résultat d’une vie de recherche. Bien qu’il ait commencé à apprendre la danse tardivement et qu’il soit indéniablement doué, il lui aura fallu beaucoup de persévérance et plusieurs échecs pour évoluer dans la danse en restant fidèle à lui-même. C’est par exemple en dansant pour des chorégraphes comme Martha Graham ou Merce Cunningham qu’il réalisera que « mon corps ne peut pas étudier des outils, des mouvements, une chorégraphie, que je n’aime pas, avec laquelle je ne me connecte pas ». C’est ici la nécessité de suivre sa propre voie qui s’exprime : une approche beaucoup plus instinctive commence à naître et bientôt son chemin de chorégraphe débute.

Là encore, les difficultés seront nombreuses : trouver sa voix d’artiste et la communiquer à ses danseurs nécessitera un travail de recherche et d’expression majeur. C’est en se confrontant à ces obstacles qu’il élabore la méthode Gaga, approche du mouvement aujourd’hui enseignée à travers le monde qui prépare les corps des danseurs et les rend disponibles en exploitant leur capacité à lâcher prise et à trouver les étapes pour cela grâce à plusieurs facteurs.

Le chorégraphe et les danseurs : s’aligner collectivement

Spectacle “Last work”, Ohad Naharin. Photo : Gadi Dagon .

Ces facteurs sont l’intentionnalité, l’écoute intérieure et l’imagination dans le mouvement, des paramètres indispensables qu’Ohad Naharin exige de ses danseurs, à qui il demande de ressentir plutôt que de faire. C’est un travail en profondeur qui demande aux danseurs de véritables efforts personnels. C’est pourquoi l’attitude créatrice vis-à-vis des difficultés, caractéristique de ce que nous décrivons lorsque nous parlons de « guerrier », est très présente dans le travail de Naharin avec sa compagnie : comme il le dit lui-même, son travail avec les danseurs consiste à « les amener à se débloquer et révéler leur trésor, en oubliant les techniques et les styles ».

Sa technique Gaga consiste en « la nécessité d’écouter notre corps avant de lui dire ce qu’il doit faire. Et de comprendre que nous devons aller au-delà de nos limites, et ce, de façon quotidienne ». Ici, Naharin parle autant de limites physiques, que de véritables barrières mentales qui peuvent empêcher un danseur de lâcher prise par rapport à un mouvement. Le documentaire montre comme exemple plusieurs scènes de répétitions où Naharin travaille avec l’imaginaire pour débloquer ses danseurs par rapport à une chute, un cri, ou une sensation.

Le cheminement du danseur tel qu’il est proposé par Naharin fait donc directement écho avec la Voie martiale et de nombreuses autres pratiques artistiques ou corporelles : c’est par un long effort de persévérance et de lâcher-prise que le pratiquant devient capable de dépasser la technique pour libérer sa singularité. Lorsque le chorégraphe et les danseurs réussissent à dialoguer et dépasser leurs limites, alors ils s’alignent au service d’un but commun : diffuser au monde un message politique et poétique.

Message politique 

Naharin ne se positionne pas comme défenseur d’idées politiques, pourtant ses spectacles et ses entretiens révèlent des positions critiques vis-à-vis d’un pays selon lui “gagné par le racisme, la brutalité, l’ignorance, un mauvais usage de la force, le fanatisme”. 

Lui même impliqué pendant son service militaire dans la guerre du Kippour, il reste aujourd’hui porteur d’un optimisme que rappelle Barak Heymann, producteur du documentaire “le film prouve assurément qu’il n’y a pas de contradiction entre d’une part, l’attitude très critique d’Ohad Naharin vis-à-vis de la politique israélienne et de l’autre, l’amour qu’il éprouve pour son pays. Cet artiste ne craint pas d’exaspérer. Il ne renonce pas à dire sa vérité.”. 

En effet et à titre d’exemple, un évènement bien particulier le consacre en 1998 comme héros culturel auprès de son pays : à l’occasion de la représentation de “Echad mi yodea” pour la célébration du jubilé de l’Etat Hébreu, le gouvernement exige de lui qu’il change les costumes pour ne pas heurter le public juif ultra orthodoxe. Fidèle à lui-même, il annonce sa démission tandis que les danseurs refusent de danser pour un événement national majeur.

Néanmoins, il n’est pas adepte de la polémique, et reste avant tout concentré sur son travail de chorégraphe : en ce sens, il parle de sujets politiques à travers des choix de mise en scène : dans “The Hole”, les danseurs comptent à voix haute alternativement en arabe et en hébreu. En vérité, son message est avant tout universel que ce soit au niveau tant poétique que politique.

Le message universel et poétique 

Il y a beaucoup d’aspects admirables dans le travail de la Batsheva. Sur scène, l’expression de notre humanité est complexe et sensible. Une densité émotionnelle saisissante est mise en mouvement par des corps tantôt impétueux et explosifs, tantôt délicats et tendres. Il y a l’humour aussi, qui vient chatouiller nos non-dits par des mises en scènes parfois insolentes. Beaucoup de sensations, d’émotions et de vie jaillissent de l’époustouflante mobilité des danseurs. Mais ce qui interpelle tout particulièrement, c’est la façon dont Ohad Naharin transmet l’idée d’une danse universelle. En faisant monter sur scène le public, en animant à travers le monde des cours collectifs de Gaga, il nous montre que le danseur n’est pas que l’athlète que nous voyons sur scène. Celui qui persévère, trouve de la joie dans l’effort pour dévoiler sa singularité et œuvrer pour la poésie, ce danseur là est en chacun de nous.

Le message d’Ohad Naharin dépasse largement la chorégraphie et la danse contemporaine, il est résolument engagé, parfois politique ou insolent, mais, on l’a déjà souligné, surtout universel.

« Indépendamment de nos capacités, chacun de nous peut être en lien avec ses sensations physiques. Chacun peut comprendre le lien entre lent et rapide, dur et doux. Tout le monde peut lier l’effort au plaisir. Chacun peut dissocier les membres de son corps et les faire bouger. On peut tous se pencher, plier, se dresser. Chacun, ou presque, peut écouter une musique, ressentir un rythme. Je danse tous les jours, et je voudrais que tout le monde en fasse autant. ».
Ohad Naharin

Nos corps, par leurs limites, leurs douleurs et leurs fatigues nous rappellent à notre mort. Pour autant, ils nous permettent d’être au monde, de voir, de sentir et de bouger. La danse, comme tous les arts, permet à chacun d’expérimenter ce corps et de s’élever avec lui vers ce qui est beau. Ohad nous invite, à l’image des danseurs dans la très célèbre séquence « Echad Mi Yodea », à envoyer valser au ciel toutes ces chemises –  les blocages, les interdits, les bienséances – qui entravent nos corps, nos esprits et nos âmes. Il nous invite à persévérer, dévoiler nos trésors, et faire des pieds de nez.

Quelques liens pour découvrir M. Naharin 

  • Bande annonce du documentaire Mr. Gaga, Sur les pas d’Ohad Naharin:
  • Extraits du spectacle “Virus”

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Vincent Munier : L’éternel émerveillé

Le monde ne mourra pas par manque de merveilles,
 mais uniquement par manque d’émerveillement.

La voix humble, le regard franc, Vincent Munier est au diapason, à l’écoute, un animal parmi les autres, dans un respect absolu de l’altérité du vivant dans ce monde que nous avons en partage.

On accède à travers ce documentaire à plusieurs notions de fond qui font écho à la sensibilité humaine : le respect, l’humilité, l’importance de la transmission de ces valeurs envers la nature et le vivant par son père, l’émerveillement renouvelé sans cesse face à la beauté du monde. La patience, la mise en confiance.

Cette beauté du monde, source de l’émotion la plus vive, nous est proposée par ce regard particulier.

Et c’est parce qu’il n’a jamais perdu cette direction fondamentale de parler avec ce qu’il est, avec son cœur et ses émotions authentiques, que la force des images de Munier reste intacte, et qu’il peut autant inspirer, à la fois par son travail photographique et par ce qu’il est en tant qu’humain.

C’est également parce qu’il ne considère jamais la photographie comme une fin, mais toujours comme moyen, un outil pour véhiculer des émotions, que ses images ont cette densité si rarement présente. Cette différence est également cruciale pour comprendre le fond qui anime cet homme et qui fait de son regard une singularité remarquable.

Vincent Munier ne cherche pas l’image à tout prix, il cherche la relation. Avant de fixer une vue, il cherche d’abord à rencontrer l’animal, et ressentir cette émotion de la rencontre. Cette priorité décidera de toutes les conséquences, qu’il en reste des traces visuelles ou non.

Telle une éloge de la relation, aux autres, au vivant, ce film nous témoigne de l’importance de ce que l’on vit, de ce que l’on ressent, et comment ce fil directeur peut être à la fois un moteur puissant d’action, de rayonnement, de rencontre avec le beau, mais également un pilier d’intégrité et d’authenticité qui permet de garder un cap et d’être toujours au plus juste de ce que l’on est et de ce que l’on fait.

Cette conscience de ce qui est moteur pour lui, lui permet de renouveler sans cesse ce regard émerveillé sur le monde, tel un enfant qui découvre ce qui l’entoure, et de ne jamais se lasser de ce geste répété.

C’est ainsi qu’il peut accepter cette promesse de l’invisible, où rien n’est garanti, avec bonheur et passer des heures sans que rien ne se passe, et se positionner de telle façon que chaque moment vécu est reçu comme un don et non comme une victoire sur les êtres et les choses.

***

En toute cohérence éthique, sensible et à taille humaine, Vincent Munier a créé une maison d’édition afin de produire et de diffuser ses livres : http://www.editions.kobalann.com/ 

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Interdépendance et interstices Poésie

Taches de vie

Le pinceau est lancé, 
l’eau bondit. 
Un pied s’élève dans les airs, les oiseaux se préparent. 
La haut, 
les guerriers veillent dans la montagne.

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Cascade Poétique – Les Quatrains de François Cheng

Appréhender le Ma par l’image poétique

| PHOTO ET ENCRE DE CAMILLE COSSON

« Me voici, pierre d’attente,
Où es-tu, source amie ?
Il suffit que tu viennes,
Pour que soit mélodie » 1François Cheng, Enfin le royaume: Quatrains, d. Gallimard, 2018

Ici les fondements de ce que pourrait être une intelligence collective se font sentir. 

Celle, résolument tournée vers l’écoute d’un dialogue entre les êtres ou encore entre l’être et l’Univers.

Une proposition d’ouverture à l’expérience de l’harmonie, de la musique de la relation. Nous jouons les uns avec les autres à travers l’espace de la rencontre, et c’est en nous mettant au juste diapason que peut naître la mélodie harmonieuse.

Une grande confiance, une grande authenticité, émanent de ce poème. 

Dans ce quatrain, François Cheng semble nous murmurer qu’emprunter cette voie est apaisant et qu’un sens commun surgira sûrement de cet espace que l’on laisse en nous afin qu’un dialogue se noue avec l’autre, avec le vivant. 

N’est-ce pas ce que nous devrions expérimenter et vivre à nouveau ? En ces temps d’incertitude, ne devrions-nous pas essayer de nous tenir prêt, à l’écoute? Telle l’eau qui s’allie à la pierre pour créer en interdépendance. Il semble nous livrer ici le secret d’une rencontre féconde entre ce qui peut sembler opposé en apparence. Cette alliance des contraires ne peut se faire que grâce à la présence du trois, l’interstice, l’entre, le souffle, le Ma.

« Non l’entre -deux
mais bien le Trois
Souffle de vie
à part entière

Qui, né du Deux
mû par l’Ouvert
N’aura de cesse
de voir le jour

Temps imprévu
gonflé de sang
Nulle autre loi
qu’échange-change » 2François Cheng, Le livre du Vide Médian, ed. Albin Michel, p.19

En tous les cas, l’expérience est à tenter.
Et cette pierre d’attente ne pourrait-elle pas évoquer une maison, son architecture et son jardin ? Lorsque chaque personne passée peut y laisser sa trace et peut participer à une réalisation tout en gardant un respect du sens profond qui se dégage de ce lieu. Cela permet peut être d’éprouver le Ma dans le réel, une expérience qui se passe de mots, qui se construit sous nos yeux, à plusieurs et dans une même voie. 

Références

Références
1 François Cheng, Enfin le royaume: Quatrains, d. Gallimard, 2018
2 François Cheng, Le livre du Vide Médian, ed. Albin Michel, p.19
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Invictus

Photograhie de Nelson mandela

Cette poésie fut le mantra de Nelson Mandela, que non seulement il répéta de nombreuses fois en prison, mais qu’il mit en œuvre, par son exemplarité, tout au long de sa vie.

William Ernest Henley (1843-1903)

Out of the night that covers me,
Black as the pit from pole to pole,
I thank whatever gods may be
For my unconquerable soul.

In the fell clutch of circumstance
I have not winced nor cried aloud.
Under the bludgeonings of fate
My head is bloody, but unbowed.

Beyond this place of wrath and tears
Looms but the Horror of the shade,
And yet the menace of the years
Finds and shall find me unafraid.

It matters not how strait the gate,
How charged with punishments the scroll,
I am the master of my fate:
I am the captain of my soul.

Traduction française :

Dans les ténèbres qui m’enserrent
Noires comme un puits où l’on se noie
Je rends grâce aux dieux, quels qu’ils soient
Pour mon âme invincible et fière.

Dans de cruelles circonstances
Je n’ai ni gémi ni pleuré
Meurtri par cette existence
Je suis debout, bien que blessé.

En ce lieu de colère et de pleurs
Se profile l’ombre de la Mort
Je ne sais ce que me réserve le sort
Mais je suis, et je resterai sans peur.

Aussi étroit soit le chemin
Nombreux, les châtiments infâmes
Je suis le maître de mon destin
Je suis le capitaine de mon âme.


Asimbonanga

Paroles

Asimbonanga
Asimbonang ‘uMandela thina
Laph’ekhona
Laph’ehleli khona
Asimbonanga
Asimbonang ‘umfowethu thina
Laph’ekhona
Laph’wafela khona
Sithi Hey, wena
Hey, wena Nawe
Siyofika nini la Siyakhona

Paroles (traduction française)

nous ne l’avons pas vu
nous n’avons pas vu Mandela
à l’endroit où il est
à l’endroit où il est retenu
nous n’avons pas vu notre frère
à l’endroit où il est
à l’endroit où il est mort
Nous disons: hé, vous
Hé, vous et vous
quand allons-nous arriver à notre but ?


Présentation de l’artiste : 

Johnny Clegg (1953-2019) est un auteur-compositeur-interprète sud-africain et un danseur de danses zouloues. Les thèmes de ses chansons sont principalement axés sur la lutte contre l’apartheid en Afrique du Sud, cependant Johnny Clegg refusait toute affiliation à une idéologie particulière. Il aura plutôt placé toute son œuvre sous le signe de la tolérance, l’acceptation et la fraternité entre les êtres humains. 

Il fut l’inlassable défenseur de la culture africaine, notamment avec sa chanson la plus célèbre, Asimbonanga, qui rend hommage à Nelson Mandela, alors incarcéré depuis plus de vingt ans. Cette prise de position était d’autant plus courageuse que la simple évocation du nom du prisonnier était strictement interdite par le régime de Pretoria. 

Pour conclure, Johnny Clegg a reçu de nombreux labels – zoulou blanc, universitaire, activiste, interprète. Dans le contexte de l’apartheid en Afrique du Sud, son interaction délibérée avec des travailleurs migrants zoulous et des musiciens de rue à Johannesburg a contribué à façonner son style de performance. Sa formation en anthropologie à l’Université du Witwatersrand lui a fourni un cadre d’interprétation avec lequel il pouvait partager encore davantage ses connaissances et expériences avec un public très varié et généralement engagé.